Qu’est-ce que j’entends par « une carte qui sort là où on ne l’attend pas » ? Disons que vous faites un tirage selon une structure particulière, et que les questions sont orientées de style forces et faiblesses, bon et mauvais, avantages et inconvénients, pour et contre… Et vous tirez une carte dans la partie réservée aux bonnes choses qui est une carte que vous jugez mauvaise. Ou une bonne carte mais qui est à l’envers. Qu’est-ce qu’on fait de ça ? Est-ce que ça veut dire qu’il n’y a pas de bonnes choses ? Et si on tire une carte qu’on juge super positive et enthousiasmante dans la partie des inconvénients, des contre ? Est-ce que ça veut dire qu’on n’aura aucune difficulté ?

En premier lieu, j’aimerais rappeler que selon moi, il n’y a pas de carte bonne ou mauvaise en soi, et ça dépend beaucoup de son propre contexte, de son rapport à cette carte et ses significations, de ce qu’on a comme attentes, de ce dont on a besoin à tel moment, et aussi de la problématique spécifique. Bien sûr, certaines cartes sont plus connotées que d’autres, et elles peuvent être parfois représentées de façon à ce qu’elles évoquent des émotions spécifiques, de l’optimisme ou du pessimisme… Et ça peut dépendre d’un jeu à l’autre.

Ça va dépendre aussi de la façon dont on a l’habitude de tirer les cartes : est-ce qu’on a une lecture très binaire des cartes parce que ça nous aide à avoir une réponse très tranchée, mais que ça peut poser problème dans certains cas de figures ? D’un autre côté, si on prend l’habitude de nuancer tellement les cartes qu’on a du mal à trancher si on nous parle d’une bonne ou d’une mauvaise chose, ça peut aussi compliquer l’analyse du tirage (et en général, c’est pour ça qu’une bonne structure de tirages qui permet d’évaluer différentes facettes d’une problématique peut aider à savoir dans quel sens diriger son interprétation).

Je vais donner un exemple : 
Pour répondre à la question « quelles sont mes qualités / mes forces dans cette relation », je tire la carte du 3 d’Épées. Ouille, un cœur planté par 3 épées sur un fond de ciel gris et de pluie ! Une carte qu’on associe facilement à la souffrance, à l’incompréhension, aux blessures, voire à la rupture. En quoi ce serait une force ? Le 3 d’Épées peut indiquer une capacité à se remettre en question même quand ça fait mal, le fait de prendre son temps pour résoudre ses problèmes relationnels du passé avant de s’engager, de faire attention à ne pas blesser l’autre volontairement, le fait de savoir prendre sur soi plutôt que de tout faire porter à l’autre, le fait de ne pas penser uniquement avec la raison ou uniquement avec les émotions pour permettre aux deux un bon équilibre, le fait de savoir confronter les choses difficiles plutôt que de fuir… Les 3 indiquent généralement une ouverture vers l’extérieur, une collaboration, une curiosité pour l’autre, ce qui fait que même pour le 3 d’Épées qu’on peut redouter, il y a une volonté de comprendre l’autre, d’écouter son point de vue, de prendre en considération ses sentiments (même quand ça fait mal ou que ça ne rejoint pas sa propre vision, ses propres sentiments). Alors certes, ça indique quand même potentiellement des challenges et des choses pas forcément simples ou agréables de façon inconditionnelle, mais ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de forces à en tirer. Je précise que c’est une des façons de lire cette carte, mais qu’on peut lui donner bien d’autres significations.

Comme vous le voyez, il ne s’agit pas non plus de déformer le message d’une carte pour transformer ses challenges en quelque chose de tout à fait positif et merveilleux. Mais dans tous les cas, c’est aussi notre perception de la carte qui entre en jeu et ce qu’elle va faire résonner en nous. Par ailleurs, certaines cartes peuvent se montrer très bénéfiques dans un domaine et pas du tout dans d’autres.

Prenons l’Ermite : lorsqu’il est question de construire une relation, d’être dans la démonstration affective, de se montrer ouvert·e et sociable, c’est pas top en général. On peut avoir une personne fuyante, froide, non communicative, socialement anxieuse, qui préfère la solitude à la compagnie. Par contre lorsqu’il s’agit de se remettre en question, de savoir quand prendre du recul, quand garder sa langue dans sa bouche, c’est le top. L’Ermite va souvent chercher à comprendre, à améliorer, à aider, guider et conseiller. Est-ce que l’Ermite est une bonne ou une mauvaise carte pour les questions relationnelles ? Ça dépend de ce qu’on recherche. L’Ermite va difficilement avoir une vie sociale très riche, ou se plaire dans de gros évènements sociaux, ou réussir à percer sur les réseaux, ou réussir à se montrer très pro-actif·ve dans les relations ou à relancer souvent les conversations. Les forces relationnelles de l’Ermite vont être de savoir respecter ses propres limites, de savoir se replier au bon moment, de laisser suffisamment d’espace personnel à l’autre, de cultiver des relations durables, sincères et profondes, d’avoir un grand respect pour les personnes plus âgées, plus expérimentées. Évidemment je résume énormément et grossis le trait exprès, et encore une fois ce ne sont pas les seules interprétations possibles pour cette carte.

Donc, pour résumer, l’enjeu ici sera d’élargir sa perception des cartes et de considérer que chaque carte a ses qualités et ses défauts, et qu’on va se concentrer en priorité sur les premières ou les seconds selon l’orientation de la question. Et donc, de sortir d’une sorte de binarité de perception où certaines cartes sont bonnes d’office et d’autres mauvaises d’office. Et encore une fois, il ne s’agit pas non plus de nier que certaines ont un potentiel plus positif ou négatif dans certains contextes.

Deuxième cas de figure : 
Vous utilisez les cartes à l’endroit et à l’envers, et on va considérer le fait que endroit = les bons aspects de la cartes, et envers = les mauvais aspects de la carte (même si ça peut être différent pour les personnes qui considèrent qu’une carte « négative » à l’envers la rend « positive »).

Alors, premièrement, de mon côté je préfère éviter de mélanger endroit et envers quand les questions sont déjà fortement orientées vers des aspects positifs ou négatifs, parce que je ne juge pas ça toujours nécessaire et que, dans ce cas de figure, ça peut amener plus de confusion qu’autre chose. Cela dit, chacun·e fait comme iel le sent : l’important c’est que vous soyez à l’aise avec la convention que vous adoptez, et qu’elle soit claire pour vous avant même de tirer les cartes pour éviter de faire dire aux cartes le contraire de ce qu’elles ont à dire pour ajuster en fonction.

Pour une question de type « quelles sont mes qualités / mes forces », vous tirez une carte à l’envers. Dans le cas où ça vient pointer les aspects négatifs, effectivement ça va être compliqué de ne pas déformer le message pour trouver une réponse appropriée. Il faudra peut-être alors décider de se dire qu’une carte à l’envers ici pourrait dire que c’est une qualité que vous avez du mal à percevoir chez vous, ou une qualité qui vous demande beaucoup d’efforts, une force qui est momentanément hors de votre portée parce que c’est une mauvaise période pour vous… Et donc il s’agit de lire la carte sous ses bons aspects, mais de prendre en compte le fait qu’il y a quand même un blocage, un contretemps, quelque chose de plus compliqué que prévu, un « mais ». Encore une fois, il vaut mieux décider de ce que pourrait impliquer une carte à l’envers dans ce cas précis avant le tirage.

Je précise que je m’en suis tenu à l’exemple du tarot ici, parce que ce que j’aime dans les arcanes du tarot, c’est qu’elles sont assez ouvertes dans leurs interprétations. Quand on tire avec un oracle qui a des cartes très fortement connotées positivement ou négativement, ça peut effectivement demander une gymnastique plus importante. Vous pouvez choisir d’utiliser le contraire / l’opposé du mot-clé si la question invite précisément à quelque chose de forcément soit positif soit négatif. Vous pouvez choisir de vous concentrer sur le visuel plutôt que sur le mot-clé. Certains oracles viennent également avec des interprétations selon l’endroit ou l’envers de la carte, ce qui rend les choses plus simples. Le cas des oracles étant plus complexe et parfois contraignants selon les thématiques de ceux-ci, peut-être pouvez-vous aussi choisir de les utiliser uniquement dans des questions « ouvertes », qui n’appellent pas forcément à voir le positif versus le négatif, et choisir le tarot pour le reste.

Quel que soit le cas de figure, tomber sur une carte que vous jugez mauvaise pour une question qui est censée amener quelque chose de positif, ça peut indiquer qu’il y a quelque chose à travailler, un défi, quelque chose qui n’est pas aussi fluide que prévu, et si vraiment ça vous pose question, vous pouvez décider d’approfondir ce point précis avec un autre tirage. Et si on tire une carte « positive » là où on pensait voir quelque chose de plus négatif, on peut se concentrer sur les moins bons aspects de la carte en premier, mais aussi se dire que ça indique potentiellement plus de facilités que prévu, une résolution rapide, des forces ou des allié·es inattendu·es, quelque chose de pas si dramatique.

Si tout ça ne vous aide pas à mieux comprendre votre tirage, demandez-vous si vous l’avez réalisé dans de bonnes conditions, avec un deck qui vous parle bien, si vous avez bien compris les questions, et si vous aviez l’esprit assez clair pour tirer les cartes. Si ça vous semble trop flou pour le moment, peut-être y a-t-il aussi des choses que vous n’êtes pas prêt·es à confronter, et c’est OK. Ne forcez pas le truc, revenez-y plus tard (ou pas, si ça vous met dans l’anxiété de tirer à ce sujet).

Il est aussi possible qu’on tombe juste sur une carte qu’on a du mal à comprendre, sans que ce soit « étrange » qu’elle sorte pour telle ou telle question. Dans ce cas, je vous renvoie à l’article Quand on bloque sur un tirage.

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